L'exclusion de la portabilité du DIF en cas de licenciement pour faute lourde conforme à la Constitution

Le Conseil Constitutionnel déclare dans une décision du 29 juillet 2016, les dispositions de l'article L6323-17 du Code du travail « dans sa version applicable au litige », concernant l'exclusion de la portabilité du DIF aux salariés licenciés pour faute lourde, conformes à la Constitution.

Par - Le 29 juillet 2016.

Position des requérants : méconnaissance du principe d'égalité devant la loi et atteinte à l'égal accès à la formation professionnelle

Il était soutenu par les requérants qu'en privant le salarié licencié pour faute lourde de la possibilité de bénéficier du droit individuel à la formation, les dispositions contestées méconnaissent le principe d'égalité devant la loi et portent atteinte à l'égal accès à la formation professionnelle.

Principe d'égalité devant la loi : selon l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, la loi « doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse ». Or, au au sein du premier alinéa de l'article L6323-17 du Code du travail, les mots « non consécutif à une faute lourde » excluent le salarié licencié pour faute lourde du champ d'application des dispositions de cet article.

Principe d'égal accès à la formation professionnelle : selon le treizième alinéa du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 : « La Nation garantit l'égal accès de l'enfant et de l'adulte à l'instruction, à la formation professionnelle et à la culture... ». Il en résulte que la mise en œuvre d'une politique garantissant un égal accès de tous à la formation professionnelle constitue une exigence constitutionnelle, ce dont il résultait que la loi ne pouvait écarter certains salariés (ceux licenciés pour faute lourde) du dispositif de portabilité du DIF.

L'exclusion de la portabilité du DIF en cas de faute lourde liée à l'absence de préavis

Le Conseil constitutionnel rappelle le fonctionnement du dispositif de portabilité mis en place par la loi du 24 novembre 2009 et codifié à l'article L6323-17 du Code du travail incriminé.

Ce texte fixe les modalités selon lesquelles les salariés peuvent solliciter le financement de leur DIF avant leur départ de l'entreprise, pendant leur préavis.

Le Conseil des sages en déduit que l'impossibilité pour le salarié licencié pour faute lourde de demander, postérieurement à l'expiration de son contrat de travail, le bénéfice des heures acquises au titre du DIF et non utilisées à la date d'effet de son licenciement ne résulte pas des dispositions contestées de l'article L6323-17 du Code du travail.

En effet, les salariés licenciés pour faute lourde sont dans l'impossibilité d'exécuter un préavis, la faute commise et justifiant la rupture du contrat de travail entraînant une rupture immédiate des relations contractuelles. Les dispositions de l'article L6323-17 du Code du travail ne font que tirer les conséquences de l'absence de droit à un préavis de ces salariés.

Les griefs tirés de la méconnaissance des principes d'égalité devant la loi et d'égal accès à la formation professionnelle sont donc écartés.

La question prioritaire de constitutionnalité

Le Conseil constitutionnel a été saisi le 31 mai 2016 par la Cour de Cassation (Chambre sociale, arrêts n° 1255 et 1256 du même jour) de deux questions prioritaires de constitutionnalité relatives à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit du premier alinéa de l'article L6323-17 du Code du travail « dans sa version applicable au litige ».

Le premier alinéa de l'article L6323-17 du Code du travail dans sa rédaction résultant de la loi du 24 novembre 2009 prévoit : « En cas de licenciement non consécutif à une faute lourde, et si le salarié en fait la demande avant la fin du préavis, la somme correspondant au solde du nombre d'heures acquises au titre du droit individuel à la formation et non utilisées, multiplié par le montant forfaitaire visé au deuxième alinéa de l'article L6332-14, permet de financer tout ou partie d'une action de bilan de compétences, de validation des acquis de l'expérience ou de formation. À défaut d'une telle demande, la somme n'est pas due par l'employeur ».

[Décision n° 2016-558/559 QPC du 29 juillet 2016

 >http://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/francais/les-decisions/acces-par-date/decisions-depuis-1959/2016/2016-558/559-qpc/decision-n-2016-558-559-qpc-du-29-juillet-2016.147702.html] Publication de la décision au JO du 31 juillet 2016